Isadora Bigourdan, COO de Digital Africa, donne aux entrepreneurs technologiques africains les moyens de concevoir et de développer des innovations révolutionnaires pour l’économie réelle. 

Isadora Bigourdan, vous êtes aujourd’hui directrice des opérations de Digital Africa. Pouvez-vous nous dire comment vous êtes arrivée à ce poste et ce qui vous y a amené ? 

Depuis près de 20 ans, je travaille au financement d’entreprises innovantes, principalement en Amérique latine et en Afrique. En tant que avocate d’affaires, investisseur ou consultante, j’ai pu remarquer que les entrepreneurs innovants apportent des solutions capables de répondre aux défis auxquels notre monde est confronté en termes de modèle de développement, mais ils ont un réel besoin de formation, de financement et de soutien pour que les écosystèmes dans lesquels ils opèrent soient en mesure de transformer leurs idées en entreprises durables. C’est là qu’intervient Digital Africa : nous fonctionnons comme un guichet unique pour les entrepreneurs technologiques en phase de démarrage en Afrique. 

En quelques mots, qu’est-ce que Digital Africa ? Quelle est la mission principale de l’organisation ?

Digital Africa est une filiale du groupe AFD-Proparco axée sur le développement du secteur privé. Notre mission est de doter les entrepreneurs technologiques africains des moyens nécessaires pour concevoir et mettre en œuvre des innovations porteuses de changement économique radical. En bref, nous développons l’expertise, nous créons des communautés d’échanges de connaissance, nous fournissons de l’assistance technique, nous finançons des projets et des entreprises  – par le biais de subventions ainsi que d’investissements de départ – ; enfin, nous facilitons l’accès au marché et la création d’un environnement réglementaire favorable à l’innovation africaine.

Digital Africa Tech

Concrètement, quelles sont aujourd’hui les priorités de Digital Africa sur le terrain ?

Notre objectif principal est de tirer parti de l’énorme potentiel que l’économie numérique apporte au continent africain et de faire en sorte qu’une technologie made in Africa voie le jour. Pour l’instant, seuls cinq pays africains (Afrique du Sud, Égypte, Kenya, Nigeria et Sénégal) reçoivent 90 % des fonds d’investissement. Nous avons mis au point un outil d’investissement spécifique, appelé FUZE, afin d’apporter un financement approprié aux entreprises technologiques en phase de démarrage dans le reste du continent. Notre priorité est donc de contribuer à diffuser les mêmes opportunités sur tout le continent pour garantir l’inclusion. 

Quels sont, selon vous, les principaux défis à relever pour atteindre ces objectifs et que peut-on faire ?

Le principal défi est de s’assurer que chaque programme que nous développons est construit avec une approche écosystémique : nous souhaitons réunir toutes les parties prenantes, des décideurs politiques aux investisseurs, en passant par les universitaires, les entrepreneurs, les business angels du continent ou de la diaspora, etc. L’entrepreneuriat est très présent en Afrique, mais il reste trop souvent à un niveau microéconomique et a un impact limité. Notre défi consiste à créer les conditions favorables pour que les entreprises technologiques puissent se développer et apporter de réels bénéfices aux populations. 

En quoi la question de l’éducation en Afrique est-elle importante pour vous et pour l’avenir des pays africains ?

L’éducation est essentielle en Afrique : plus de 12 millions de jeunes talents arrivent chaque jour sur le marché du travail et seulement 3 millions d’emplois sont créés. Un quart d’entre eux déclarent vouloir créer une entreprise et la plupart d’entre eux sont des “digital natives”. Souvent autodidactes, leur manque de compétences entrepreneuriales et leur faible capacité à lever de premiers fonds pour lancer leur entreprise les empêchent de transformer leur idée ou innovation technologique en une entreprise pérenne.

Si l’on considère que 230 millions d’emplois nécessiteront des compétences et un état d’esprit numériques d’ici 2030 sur le continent, il est nécessaire de développer l’accès à ces nouvelles compétences. C’est toute la logique de notre programme Talent4startups, que nous avons développé avec la coopération allemande et Make it. 293 talents ont été formés et sont aujourd’hui en poste dans des startups de 12 pays africains. 

N’hésitez pas à visiter notre site internet et à postuler à l’un de nos programmes. Tout ce que nous opérons est accessible et ouvert aux partenariats. Fonctionnant comme un catalyseur, nous sommes toujours à la recherche de nouveaux partenariats et de projets à soutenir pour faire de la tech made in Africa une réalité ! 

Comment allez-vous participer au Festival LearningPlanet ?

Nous participerons à la session à propos du numérique comme levier pour accélérer la transformation du continent et améliorer la vie des populations : l’Afrique manque de beaucoup d’infrastructures et les outils numériques représentent une réelle opportunité. Nous organisons également une discussion avec nos correspondants sur le terrain pour échanger sur les talents et les nouvelles compétences dont le continent a besoin pour réussir sa transformation numérique.