Loïc Blaise porte deux thématiques cruciales du Festival LearningPlanet, le bien-être et l’environnement : il est aviateur, explorateur, conférencier, inventeur d’outils à destination de personnes en situation de handicap… Toutes les actions engagées qu’il mène sont mues par la certitude que santé humaine et santé de notre planète relèvent de la même démarche, un combat qui exige engagement, discernement sans faille et parler vrai. Son dernier projet en date : un tour du monde reliant les territoires et les peuples les plus menacés à bord d’un avion 100% propre.
Six ans après avoir reçu le diagnostic d’une maladie chronique invalidante, vous partez en ULM avec le cosmonaute Valery Tokarev pour effectuer le tour du monde des glaces en ULM et depuis, vous ne renoncez jamais à entreprendre. Face à l’adversité, l’action est donc votre moteur ?
L’action n’est pas un moteur. Le désir en est un, mais il faut le transformer. L’action est une réponse, une réponse à l’envie, à la colère, au sentiment amoureux comme à l’angoisse. Par exemple, celle d’un temps qui passe et que l’on ressent tellement fort quand on est malade. Ou bien quand le thermomètre affiche 30 degrés en novembre. Il y a aussi le temps que l’on n’a pas et celui que l’on ne peut plus prendre. Pendant une crise, après un choc, on s’enlise souvent dans la sidération.
La clé, c’est de trouver un passage vers l’acte, acte qui ne se déclenche que si quelqu’un ou quelque chose nous met la main sur l’épaule pour nous souffler une voie possible.
On l’a fait pour moi, quand j’étais au plus bas, après le diagnostic et le retrait de mes licences de vol. C’est certainement la racine de tout ce que j’entreprends, chercher et déployer des solutions.
Ma vitamine aujourd’hui, c’est la nécessaire insolence face à ce qu’on nous présente comme irrémédiable et face à ceux qui en font un commerce criminel. Les champions du greenwashing nous font perdre un temps considérable. Pire, il y a des groupes comme Total Énergies qui se lancent dans la transition énergétique, mais en imposant leur rythme et en gardant leur ADN, avec un total mépris pour la vie, humaine entre autres. Il ne fait pas bon être hypocrite au nez des désespérés.
Au pied du mur, on se rend compte cependant assez vite de l’extraordinaire puissance de régénération du vivant et ses infinies capacités de transformation. Au final, mon vrai moteur c’est mon fils, c’est la jeunesse et son refus du statu quo et de l’impossible. C’est tous ceux qui payent la note sans avoir rien demandé à personne. Ceux que l’on déconsidère, ceux en dehors de la norme et qui souffrent de mille violences, les violences sociales, environnementales, culturelles. Tout participe du même schéma. Mon vrai moteur, c’est démontrer qu’il y a bien plus de possibles que ce qu’il n’y paraît et qu’il y a une autre histoire possible, à notre portée celle-là, aussi exigeante qu’indispensable et réjouissante.
Décarboner la planète, témoigner de la détérioration de la banquise, entreprendre des défis nouveaux, inventer des outils qui améliorent le quotidien des personnes en situation de handicap… La liste de vos engagements est longue.
Ce qui me marque le plus, c’est l’humain. L’humain est au centre de mon travail, c’est même la partie la plus fascinante de l’exploration. La rencontre est un formidable accélérateur de transformation. De la banquise, j’ai surtout ramené de nombreuses leçons et les témoignages de ceux qui vivent en première ligne des bouleversements climatiques. À cet égard, la réponse à la crise que nous traversons ne peut pas être techno-centrée.
Il faut cultiver l’empathie et susciter l’envie de soigner, de guérir, d’outiller intellectuellement les citoyens.
Encore une fois, ce que l’on peut accomplir collectivement est tout aussi grand que notre capacité de nuisance sur la planète. Nous avons besoin de retrouver une énergie très féminine, une énergie de guérison. Hommes ou femmes, cette énergie est en nous. Du Burkina Faso au Groenland, les initiatives les plus humbles et les plus impactantes dont j’ai pu être témoin sont d’ailleurs menées par des femmes.
Transcender nos propres préoccupations revient à donner un sens fort à l’existence. Est-ce aussi la meilleure voie pour prendre soin de soi et des autres ?
Absolument. Tout est lié. Il faut prendre soin du monde si l’on veut prendre soin de soi. S’ouvrir et aller chercher les solutions en soi, comme chez les autres. La différence est une richesse inouïe, il faut créer des ponts de coopération interculturelle et intergénérationnelle. Ça fonctionne à merveille ! Pour ma prochaine expédition, je réponds à un besoin de scientifiques américains grâce à des enfants, des chasseurs et un shaman groenlandais.
Si les moteurs de chacun sont différents, ce n’est pas un problème : c’est une richesse. Il y a un intérêt commun à la défense de notre planète et une obligation totale de moyens. L’isolement et le repli sont nos pires ennemis. La préservation de notre planète est victime chez